Il se présente sous la forme de trois terrasses en gradins que l'on franchit à travers des pavillons d'entrés dans lesquels sont les escaliers et qui aboutissent à un terre-plein d'environ 60 m sur 40 m sur lequel se trouve le temple principal.
La photo ci-contre montre l'ensemble des terrasses vu depuis le sommet du temple principal.
Construit vers 1430, et situé à 30 km à l'est de Solo, à 900 m d'altitude sur les pentes du G. Lawu, ce temple est appelé le temple érotique à cause de ses multiples représentations explicites.
Le premier portail
nous donne une idée de ce que nous verrons ensuite avec un superbe phallus pointant
une jolie vulve renflée.
L'impression générale qui se dégage de ce sanctuaire vraiment particulier est qu'on a affaire ici à des cultes liés à la sexualité.
On y croise des statues d'hommes sans têtes (certainement Bima), mais pas sans arguments car dans une main, ils tiennent un gourdin, et dans l'autre ils tiennent leur pénis en érection.
On
côtoie divers animaux dont un sanglier, bien membré lui aussi,
et un éléphant encore mieux membré, et sur les murs du temple,
les gargouilles sont à l'image de Bhima, les jambes écartées,
le membre viril bien tendu, et tenant une corne d'abondance dans
la main droite.
On dit du temple principal qu'il fait penser aux temples aztèques : une pyramide trapézoïdale qui s'élève en gradins avec une rampe d'escaliers grimpant tout le long jusqu'au sommet.
Or, ici on n'a
pas du tout cette image car les escaliers sont à l'intérieur, ils sont invisibles.
En
réalité, ce qu'on voit, c'est un triangle tronqué de couleur
foncée, avec une fente verticale au milieu. Vu le contexte, le
symbole me paraît très clair : c'est la représentation d'un
immense sexe féminin, un immense yoni.
En haut des escaliers sur la plate-forme se trouvait en plus un énorme lingam de deux mètres de haut, qui se trouve maintenant au musée national de Jakarta, et dont le sommet est entouré de quatre boules.
Ces quatre boules disposées selon les quatre directions représentent, habituellement, quatre têtes de Shiva symbolisant à la fois son omnipotence et son omniscience.
Toutefois, dans le cas présent, ces quatre boules semblent , sur la représentation ci-contre, être des grosses mamelles bien gorgées de lait, symbole évident d'un culte à la fertilité.
Donc, l'adepte entrait dans le sanctuaire comme dans la matrice originelle, l'ascension initiatique des escaliers le purifiait, il ressortait en haut régénéré, ressuscité.
Arrivé près du lingam, emplit des effluves cosmiques primordiaux, il n'avait plus peur de rien, "la force était avec lui !"
Au
pied du monument, trois tables en formes de tortues devaient
servir aux offrandes.
Il y a aussi, sur et autour du sanctuaire principal et des trois petites structures qui le précède plusieurs autels comportant de nombreux panneaux sculptés avec des motifs de type Wayang.
Ces récits mettent
en scènes Bima, sa naissance et son apprentissage, puis sa quête pour trouver
son guru.
On suit aussi
le frère de Bima, Sadeva, dans l'histoire tirée du Sudamala, qui conte comment
il parvient à sauver Uma qu'une malédiction avait contrainte à prendre la forme
de Durga.
Une autre image qui participe également à cette idéologie salvatrice et que l'on voit plusieurs fois représentées, est celle de l'oiseau Garuda dans un épisode du Garudeya dans lequel il obtient la délivrance de sa mère Vinata.
On sait que c'est
également pour délivrer sa mère de la mort que Garuda vole l'Amrita, l'élixir
d'immortalité.
La forge de Bima.
Sur ce panneau, fameux, on voit Bima, à gauche de l'image, en train de forger un kriss, à mains nues, tout en se servant de son genou gauche comme d'une enclume.
On sait que le kriss est une arme, un poignard, sacré et, pour qu'il soit véritablement sacré, il doit être façonné avec du métal météoritique, donc tombé des cieux.
Bima est donc présenté ici comme le forgeron des dieux.
On notera aussi que nous voyons sur ce panneau la toute première, la plus ancienne, représentation d'un kriss à Java.
Ce panneau a été sculpté en 1478.
Candi
Cetho ou Ceto :
Construit
vers 1470, ce temple est situé à 1500 m d'altitude sur les
pentes du G. Lawu près du petit village de Kadipeso à quelques
kilomètres au nord du temple précédent.
Dans un décor superbe, ce complexe de sept terrasses en gradins contient tout comme le Candi Sukuh des représentations liés au culte de la fertilité par une regénéressence d'origine solaire.
On
y retrouve les représentations ithyphalliques de Bima, des lingams,
et des animaux symboliques, tortues, chauves-souris, grenouilles,
lézards.
Au pied du sanctuaire, deux mosaïques de pierres, que l'on nous invite à franchir, représente des symboles de la fertilité ou des âmes des morts.
On
trouve d'abord le symbole dualiste lingam yoni, comme au temple
précédent, mais ici, le triangle de la yoni est couvert de neuf
petits animaux sculptés : trois grenouilles au centre, trois
lézards dans les angles, plus dans les bissectrices, une
anguille, une écrevisse, et un petit crustacé avec la queue en
forme de poignard, appelé "mimi". Derrière cette
représentation, une grande chauve-souris aux ailes déployées
porte sur son dos une tortue.
Sur la tortue, se trouvait autrefois un grand lingam dont le sommet était orné de quatre boules comme celui du Candi Sukuh. Il y a là très certainement un motif lié à la mort, et aux âmes des ancêtres, et on pense inévitablement à ces cimetières vietnamiens dans lesquels les stèles funéraires sont posées sur des dos de tortues.
Comme au Candi Sukuh, on trouve de nombreuses représentations de personnages dans le style "wayang".
Le XVe siècle est celui de l'islamisation massive de la population javanaise, accentuée par le développement du commerce, aux mains des musulmans, arabes, indiens ou chinois. L'Empire Mojopahit est en pleine déconfiture.Il faut résister physiquement, en s'isolent dans les montagnes où seront dorénavant construits les sanctuaires. Il faut aussi résister spirituellement. Un nouveau culte apparaîtra, un culte tantrique dédié a Bima, le Seigneur du Mont Bromo, la nouvelle montagne sacrée, et dans lequel Bima, tel notre Hercule, sera le héros à la fois fertilisateur et salvateur. Son culte se diffusera largement grâce au wayang qui contera ses "travaux" dans les villages des hauts plateaux.
Aujourd'hui encore, le Kasada, la grande fête du nouvel an des Tengger, a lieu justement au mont Bromo, à la même date, février/mars, que la plus grande fête des Mojopahit, le Caitra, la fête du riz nouveau, début de la nouvelle année.
Candi Kethek :
Adresse
: Dusun Cetho, desa Gumeng, Kec. Jenawi, Kab. Karanganyar.
On accède facilement à ce temple, à pied depuis le Candi Cetho. Un petit portail à gauche de la troisième terrasse donne accès d'abord à une série d'étals qui permettent, éventuellement, de se désaltérer puis, chemin faisant, et toujours tout droit sur le même sentier, on aboutit, au bout de dix minutes au pied du candi Kethek.
On
a affaire là vraiment à un temple pyramide de cinq niveaux, comme
celles qu'on peut voir sur le mont Penanggungan, près de Malang, à
Java est.
Plutôt
que d'une vrai pyramide, il s'agit en fait de l'aménagement en terrasse,
faite de pierres, d'une portion du flan de la montagne. Il n'y a donc qu'un
coté de bâti.
Un escalier central permet d'accéder à la petite plateforme sommitale où a été édifié, directement sur la terre, donc en arrière de la partie construite, un espèce d'autel ou de sanctuaire, qui me ferait plutôt penser, par son aspect barroque, avec son parasol et ses grigris, à la hutte d'un chamane.
Situs Planggatan :
Adresse
: Dusun Tambak, Desa Planggatan, Kec.Ngargoyoso, Kab.Karanganyar.
(Image Google Maps)
Y
aller : On rejoint le Candi ou plutôt le Situs Planggatan (car il n'y
a aucun édifice) depuis le Candi Sukuh. La distance qui les sépare
est d'environ 6 km.
L'image
ci-dessus est trompeuse car on a l'impression que les deux sites sont proches.
Et, effectivement, ils sont proches, mais à vol d'oiseau car, entre les
deux hameaux, il y a un profond canyon à franchir. Au total, il faut
compter environ 20 mn, en s'aidant d'un GPS et en demandant sur place car, même
dans le hameau de Planggatan, le panneau indiquant le site, se trouve seulement
au départ du sentier qui y mène, à 20 m.
Ce
sentier part d'ailleurs d'une rue extrèmement étroite. Impossible
de se garer, encore moins de se croiser.
Le site se trouve dans un sous-bois. Tout ce qu'on voit, au premier abord, c'est un semblant de colline recouverte d'humus (on peut penser que les restes du candi sont en dessous), et un ou deux petits murets de pierres, plus d'autres blocs disséminés ici et là, dont une petite yoni, qui nous dit que ce site était, très probablement dédié au culte d'une forme de Shiva, tout comme les autres temples alentour.
Cependant, un peu plus loin, des marques sur le sol indiquent clairement que
le Candi Planggatan était, lui-aussi, un temple à terrasses.
Mes
datations du site de Candi Planggatan : Le site comprenait deux terrasses, visibles
sur l'image ci-dessus.
La terrasse la plus basse (en vert sur la photo), la plus ancienne, a été édifiée en 1463. Celle du dessus (avec les marques de constructions au sol) date de 1464. Les parties supérieures, au pied des arbres (photo du haut), datent de 1466.
L'intérêt, car il y en a tout de même un pour les curieux courageux, c'est que certaines de ces pierres présentent des sculptures très intéressantes, qui nous laissent imaginer ce que pouvait donner à voir ce site du temps de sa plendeur
Les images offertes par le Candi Sukuh, à coté, nous en donnent
une idée car il s'agit du même style de personnages que l'on retrouve
dans le théâtre d'ombre javanais d'aujourd'hui.
Toutes
les sculptures présentées ici datent de 1464.