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Les
cinq Rathas
Les
Rathas sont regroupés tout au sud du village dans un site aménagé
et clos. Il s'agit de cinq édifices auxquels on a donnés
les noms des héros de la fameuse épopée indienne,
le mahabaratta (ceux, qui ont vu la pièce de théâtre
de Peter Brook au festival d'Avignon, il y a 20 ans, doivent s'en souvenir),
c'est-à-dire les Pandava, ainsi que leur épouse commune.
Il y a donc du nord au sud, en se suivant et probablement extrait du même
bloc rocheux, le ratha de Draupadi (l'épouse), puis respectivement
ceux d'Arjuna, de Bhima et de Yudhisthira ou Dharmaraja. Dharmaraja signifie
le roi du dharma, c'est-à-dire la Loi. Yudhisthira étant
l'ainé des Pandava est donc le roi. Un peu à l'écart,
se trouve le ratha de Nakula sahadeva du nom des deux jumeaux. A côté
de ce dernier monolithe, se trouve un magnifique éléphant,
sculpté lui aussi dans un bloc rocheux, peut-être le même
que le monolithe des jumeaux.
Devant
le ratha de Draupadi, on trouve une statue représentant un lion
et derrière l'édifice d'Arjuna se trouve un grand taureau
couché.
La caractéristique de ces monuments est qu'ils représentent
divers types de constructions qui existaient à l'époque.
On en a repris, ici, ces formes variées pour en faire des lieux
de culte. Le résultat est très intéressant, bien
que, comme la plupart des monuments de Mahabalipuram, ceux-ci sont inachevés.
Mais pour autant, cette expérience originale ne sera jamais poursuivie,
par la suite, dans l'architecture indienne.
Le
ratha de Draupadi :
Cet
édifice est à la fois le plus simple du groupe et le plus
étonnant pour un "temple". C'est une réplique
en pierre des huttes en toitures de palmes que les ascètes ou renonçants
indiens - les samnyasins - se construisent dans les forêts où
ils se retirent. La toiture est soutenue par des pilastres d'angles.
De
part et d'autre de l'entrée, on trouve des femmes gardiens - dvarapalika
- et des sculptures de la déesse Durga, la shakti ou parèdre
de Shiva, dans des grandes niches sur les trois autres côtés.
Ce
qui indique que ce temple était certainement consacré à
cette déesse, d'autant plus qu'on la retrouve, dominante dans une
superbe fresque à l'intérieur de la cella où elle
est entourée d'adorateurs dont un montre qu'il est prêt à
offrir sa tête à la déesse en se la tranchant, lui-même.
Ces
actes de sacrifices sont courant en Inde. De nos jours encore, les dévots,
lors d'un pèlerinage familial, offrent leur tonsure en un geste
d'humilité, aux pieds de leur divinité favorite.
Les niches et le linteau sont surmontés d'une décoration
en forme de makara-torana. Devant l'entrée du temple, se trouve
élevé un grand lion, l'animal monture - vamana - de Durga,
et derrière le monument, on peut voir un grand taureau, l'animal
monture de Shiva.
Le
ratha d'Arjuna :
Ce
temple de structure pyramidale, le plus charmant de tous, est aussi le
plus élégamment orné avec de nombreuses sculptures
en haut relief. Il était certainement consacré à
Indra car un magnifique éléphant - l'éléphant
Airavata est l'animal monture d'Indra - est élevé devant
l'entrée de l'édifice.
Indra
apparaît également avec son animal monture au centre de la
face arrière du temple. Sont aussi représentés, les
autres divinités de la trimurti, Vishnu avec l'aigle Garuda, et
Shiva appuyé sur le taureau Nandi et entouré par un couple
royal, escorté de serviteurs. Ce sont les donateurs du temple.
On peut voir également un sage - Rsi - avec son disciple, ainsi
que des représentations de couples d'amoureux enlacés- mithuna
- si souvent représentés en Inde (le pays du Kama-sutra).
La décoration des étages est faite de petits pavillons et
de kudus, de rangées de nains - gana -, et des frises d'oies. Le
portique d'entrée est soutenu par des piliers et des pilastres,
reposant sur des lions. Dans la cella, une tête portant des cornes
représente certainement Shiva.
Le
ratha de Bhima :
Le
monument est, lui-même, original car hétéroclite.
Le temple est supporté par de gros pilastres dans les angles et
la superstructure est formée d'une terrasse classique de pavillons
et de kudus, puis d'une couverture représentant, elle-même,
une habitation dont le toit de palme en forme d'ogive est supporté
par des colonnes dominées par des kudus.
La
véranda est formée de colonnes et de pilastres qui reposent
sur une base de lions assis.
Le
ratha de Yudhisthira :
C'est le plus grand de tous. Il ressemble au monument dédié
à Arjuna avec son vimana pyramidal que domine un shikkara octogonal.
Les
trois étages, qui vont en diminuant, sont ornés de pavillons
faisant balustrades et représentant des temples en miniatures,
rangés, au-dessus, d'une frise représentant des fenêtres
en fer à cheval ou kudus.
Les murs des terrasses sont ornés de nombreux haut-reliefs qui
représentent des divinités, mais qui, malheureusement, sont
très peu visibles de l'extérieur du monument.
Le
rez-de-chaussée présente une véranda à colonnes
et pilastres, posés sur des lions assis sur des bases en cube.
En dessous, le long du soubassement, on peut voir une frise de petits
animaux en ronde-bosse tous différents.
Les quatre gros piliers angulaires sont ornés de chaque côté
d'une niche avec une statue. On y reconnaît des divinités,
telles que Brahma, Skanda, le fils de Shiva, Harihara, divinité
mi-Shiva mi-Vishnu ou encore Ardhanarisvara, un Shiva mi-homme mi-femme.
Un
panneau représente également le batisseur de l'édifice,
le roi Narasimhavarman Ier.
Le
ratha de Nakula Sahadeva :
Nommé
ainsi d'après les jumeaux Pandava, ce temple, situé à
l'écart des quatre précédents, est lui aussi particulièrement
original, évoquant les sanctuaires à absides bouddhiques
ou chaitya. Son porche est soutenu par deux piliers au lion. Cet édifice
est sensiblement de la même dimension que le grand éléphant
à ses côtés, si bien qu'il est difficile de voir l'un
sans l'autre.
Les
cinq rathas sont particulièrement beaux au coucher du soleil, mais
c'est aussi là qu'il y a le plus de monde. Sur la place attenante,
je vous invite à déguster une noix de coco à l'eau
si désaltérante, et à goûter le palmero, ce
fruit inconnu en France. Très sucré, il est succulent quand
il est bien mûr. C'est un fruit blanc, assez charnu, inséré
dans une coque marron noir. La coque, dure, est souvent jumelée
par trois. Il faut l'ouvrir à la machette comme la noix de coco.
Financièrement parlant, ça ne coûte rien du tout.
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