Ce groupe comprenait à l'origine un complexe de temples à vocation hindouiste gravitant autour d'une pyramide à gradins tronquée, posée sur une colline, premier état du Candi Borobudur. Les sanctuaires liés à la pyramide et existant encore sont le Candi Pawon, le Candi Mendut, et le Candi Bajong dont les ruines ne peuvent être fouillées car elles sont dans le cimetière du village du même nom.
Sur cette pyramide va être édifié, à l'extrême fin du VIIIe s le premier Borobudur bouddhique (état n°2) en suivant la forme, la ligne et l'orientation de la pyramide, mais consacré aux cinq Jina. Malheureusement, un glissement de terrains va emporter les deuxième et troisième galeries et nécessiter une refonte complète du monument qui sera entreprise dès le début du IXe s. Ce troisième état s'achèvera une vingtaine d'années plus tard.
En 832, les Sanjaya réunifient tout le centre de Java sous leur bannière. Ils tentent alors de ramener à leur conception religieuse la population en édifiant des temples hindouistes juste à coté des sanctuaires bouddhistes et qui comprendront des éléments de décorations bouddhistes, comme le Candi Prambanan qui sera construit juste à coté du grand complexe du Candi Sewu et aussi du Candi Banon construit à coté du Candi Pawon, ou bien en achevant des monuments bouddhiques en y incorporant quelques éléments proprement hindouistes.
Ce sera le cas pour le Borobudur que les Sanjaya reprendront après 932 et qu'ils achèveront en construisant notamment les grands escaliers d'accès (état 4), puis sur lequel ils rajouteront deux nouvelles séries de reliefs (état 5).
De ce monument extraordinaire, finalement on ne saura vraiment jamais ce qu'il aurait du être, et on ne sait pas encore exactement ce qu'il est. Les différentes péripéties qui ont jalonné sont histoire et sa construction l'ont rendu absolument unique. Aucun monument bouddhiste de part le monde ne lui ressemble, de près ou de loin.
Perdu
dans l'espace et le temps, recouvert puis noyé par la
végétation, le Borobudur sera finalement retrouvé par des
militaires anglais, sous le protectorat de Lord Raffles, en 1814.
Finalement dans les années 70, sous le contrôle de l'UNESCO, il
sera démonté pierre par pierre, puis remonté comme neuf,
après que l'ensemble du soubassement aura été consolidé, avec
adjonctions de conduits d'évacuation d'eau. Le nouveau Borobudur
sera finalement inauguré en 1983.
Localisation:
Borobudur se trouve à environ 40 km au nord ouest de Yogyakarta, au sud ouest du village de Muntilan, sur les pentes du mont Ajamajam.
Les étapes de la réalisation :
Sa construction démarra vers 780 sous le règne du roi Sailendra Vishnu (ou Dharmatunga). La 2e et la 3e étape, en fait une reconstruction quasi entière après un glissement de terrain qui endommagea gravement le monument, se fit à partir de 792 sous le règne du roi Indra. La quatrième étape, sans grandes modifications, fût l'uvre de Samaratunga, et la finition eut lieu sous le règne de Garung ou de Rakai Pikatan ?
Description:
C'est Thomas Stanford Raffles qui fit la première description du monument dans son "History of Java", publié à Londres en 1817.
C'est un monument de base à peu près carrée de 113 m de coté et de 30 m de haut. Il est composé d'environ 1 600 000 blocs d'endésite taillés.
Le nom de Borobudur, d'après le spécialiste de l'épigraphie J.G. de Casparis, serait la contraction d'une expression signifiant "La montagne de l'accumulation des mérites des dix états du Bodhisattva", et l'on retrouve ces dix niveaux sous la forme de dix étages qu'il faut gravir, après en avoir fait le tour, jusqu'au grand stupa central.
Ces dix étages sont :
La base ou se trouvent les fameuses sculptures cachées (visibles en photos dans le musée).
Le déambulatoire extérieur.
Les quatre terrasses carrées.
Les trois terrasses circulaires.
La plate-forme
au sommet.
Les 10 niveaux
représentent les trois divisions de l'univers bouddhiste :
Celle du monde quotidien ou des passions, appelée Kamadhatu (les deux premiers étages)
Celle de la prise de conscience, appelée Rupadhatu (les terrasses carrées).
Celle supérieure du détachement complet, appelée Arupadhatu (les terrasses circulaires).
Sur le monument se trouvent plus de 1500 extraordinaires panneaux sculptés relatant plusieurs histoires liées au bouddhisme et au Bouddha lui-même, 1200 autres décorations diverses, 504 statues de bouddha dont 72 à l'intérieur de 72 petits stupas ajourés et posés sur les terrasses circulaires, et au sommet un grand stupas de 15 m de diamètre et autant de haut.
Signification:
Le Borobudur n'est pas un temple, ça n'est pas un lieu de culte ; c'est en fait un gigantesque mandala, c'est à dire une représentation de l'univers cosmique du bouddhisme mahayanique orchestré, si l'on peut dire, par les cinq Jina (celui qui a vaincu les passions), qui sont cinq images du Bouddha, correspondant à cinq épisodes importants de sa vie et organisés selon les cinq directions de l'espace. On a donc :
A l'est, Akshabya, "l'imperturbable". Il fait le geste (mudra) de "la prise de la terre à témoin".
Au sud, Ratnasambhava, "sorti du joyau". Il fait le geste du "don de soi".
A l'ouest, Amitabha, "la lumière infinie". Il fait le geste de la "méditation".
Au nord, Amoghasiddha, "le succès éternel". Il fait le geste de "l'absence de crainte".
Et
au centre, Vairochana, "le lumineux". Il fait le geste
de "tourner la roue de la Loi".
Le Borobudur permet donc au pèlerin de méditer sur sa propre existence, sur la vacuité des choses qui nous entourent, sur le sens de la vie, tout au long des 2, 500 km de galeries et au fur et à mesure que l'on s'élève vers le sommet, que l'on se rapproche du ciel.
Les représentations sculptées :
Toutes les galeries sont recouvertes des deux cotés et parfois sur deux niveaux de panneaux sculptés, ce qui oblige aussi à faire dix tours complets si l'on veut suivre dans l'ordre toutes les séries. On a bien sûr cherché à comprendre cette immense bande dessinée en la recoupant avec des textes connus.
Mais
à cause des différentes étapes de sa construction
mouvementée, des modifications dues aussi à l'évolution des
idées religieuses qui arrivaient par vagues des Indes, des
convictions propres à chaque souverain Sailendra ou Sanjaya,
bouddhistes ou hindouistes, les histoires racontées sont assez
décousues, et certaines séries demeures mystérieuses.
Évidemment,
cela nuit grandement au cheminement intellectuel du pèlerin qui
ne s'y retrouve plus, et c'est peut-être pour cette raison que
nulle part ailleurs, ni dans aucun pays, on trouve un monument
qui ressemble de près ou même de loin à "cette
pâtisserie", comme disait Roger Vaillant.
Globalement, voici les textes reconnus sur certaines séries :
Le Karmawibhangga est un manuscrit décrivant la doctrine des causes et des conséquences du bien et du mal. On le trouve sur les panneaux cachés de la base, visibles au musée, mais dont quelques-uns uns ont été laissés à découvert sur le monument, coté sud.
Le Lalitavishtara qui raconte la vie du Bouddha historique depuis sa naissance jusqu'à son premier sermon à Bénares. 120 panneaux sur la première galerie, coté mur, série du haut.
Les Jataka
décrivent les vies antérieures du Bouddha sous la forme de 547
contes mettant souvent en scène des animaux.
Les Avadana
sont des contes moraux et des légendes mettant en scène de
hauts faits accomplis au nom du Bouddha.
On
retrouve les Jataka et les Avadana
sur la première galerie sous le Lalitavishvara,
le long de la balustrade de la même galerie en haut et en bas,
et le long de la balustrade de la deuxième galerie.
Le Gandawyuha qui raconte l'histoire de Sudhana dans sa quête pour atteindre l'illumination, et sa rencontre avec les Bodhisattva Maitreya et Samentabhadra. On peut suivre son parcours initiatique sur le mur de la seconde galerie, le mur et la balustrade de la troisième, et sur le mur de la quatrième.
Le Bhadrachari qui poursuit l'histoire de Sudhana entamée dans le Gandawyuya, avec sa promesse de suivre l'exemple du Bodhisattva Samanthabhadra. On l'a suit sur le mur de la quatrième galerie.